vendredi 20 mai 2016

Un royaume sans roi

Il existe un lieu de paix et de liberté absolu qu'on peut appeler le Royaume. Ce lieu est toujours présent du premier au dernier jour de notre vie, il s'étend sur toute la terre mais "les hommes ne le voient pas" pour reprendre les paroles de Saint Thomas.
Alors pourquoi ne voit-on jamais le royaume ? Car il s'agit d'un royaume sans roi et cette idée est insupportable pour celui qui cherche le royaume, pour celui qui veut en faire une histoire personnelle (égotique) et qui dit "un jour je rentrerai dans le royaume, un jour je serai le souverain".

Hélas (ou plutôt heureusement) celui qui veut posséder le royaume n'y aura jamais accès, c'est comme cela que je comprends la parabole de Jésus "il est plus facile pour un chameau de passer à travers le trou d'une aiguille que pour un riche d'entrer dans le royaume".
Dans cette parabole je ne vois pas le mot riche désigner seulement la dépendance matérielle, oh que non ;-) Il s'agit surtout de nos richesses conceptuelles, tous ces merveilleux concepts qu'on appose sur ce que devrait être le royaume.
Or nous sommes 7 milliards sur cette terre à vouloir réaliser l'impossible, à être la première individualité qui entrera dans le royaume. 7 milliards de visions différentes du royaume, c'est magnifique une telle diversité, c'est la puissance divine !

Pourtant le royaume nous y retournons chaque soir dans le sommeil profond, dans ce moment de grâce où le possesseur, celui qui veut être le roi, est lâché d'un coup par Dieu. Puis au petit matin le possesseur se réveille, il n'a aucun souvenir du royaume car justement il n'était pas présent. Et inlassablement il reprend sa quête "aujourd'hui je vais attaquer le royaume de telle façon, ouai ça c'est la bonne approche !".

C'est le jeu divin, qui n'a jamais eu de début et qui n'aura jamais de fin, c'est l'espoir sans fin de pouvoir entrer dans le royaume. C'est l'éternelle histoire d'amour de la créature envers le créateur.

Puis un jour l'accident divin se produit et le possesseur est définitivement emporté par Dieu, le royaume qui a toujours été là apparait ! Il ne reste plus que paix joie et amour mais plus personne pour en faire une possession ou une histoire personnelle.
C'est la paix qui ne connait pas la paix...
C'est la joie qui ne connait pas la joie...
C'est la connaissance qui ne connait pas la connaissance...
C'est l'absence de l'absence...

Alors que faire ? Rien justement, reste juste tranquille avec ce jeu divin :-)

"Connais-toi comme tu te connais dans le sommeil profond" Karl Renz

5 commentaires:

  1. Bel article bien inspiré !

    Quand tu dis "Il ne reste plus que paix joie et amour mais plus personne pour en faire une possession ou une histoire personnelle." c'est le point important...

    Pour l'ego, pour le petit personnage auquel nous nous sommes identifiés, il y a un paradoxe insoluble: le personnage cherche la Lumière constamment, car c'est uniquement dans la Lumière qu'il est libéré de tous les manques et de toutes les souffrances.
    Mais en même temps la Lumière est UNE donc elle permet pas à ce qui n'est pas elle - et donc au personnage - de continuer à exister séparément.
    Pour le personnage le choix est en quelque sorte cruel: soit rester au niveau de l'histoire personnelle ce qui signifie vivre en étant sans cesse confronté à l'insatisfaction. Soit dire oui à la Lumière ce qui va provoquer sa fin, sa mort.

    Mais heureusement nous ne sommes pas le personnage! Nous existons avant lui, et même avant la Lumière, nous sommes en-deça de la dualité Lumière/personnage !

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  2. Oui et c'est peut-être pour cela que les bouddhistes disent qu'il faut aussi se méfier du Nirvana, qui est l'expérience suprême de la lumière.

    Car dans le Nirvana peut encore subsister une dualité entre la lumière et celui qui fait l'expérience de la lumière.

    Le choix semble cruel seulement en apparence, mais en réalité accepter l'unité ne va pas faire exploser le personnage en plein vol, c'est l'identification au personnage qui meurt.

    Ceux qui ont accepté cette unité continuent de se lever le matin pour accomplir des tâches triviales comme payer ses factures.

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  3. Tu as mal compris la parabole de Jésus. Lorsqu'il dit "il est plus facile pour un chameau de passer à travers le trou d'une aiguille que pour un riche d'entrer dans le royaume", ça signifie en quelque sorte que l'homme est incapable de tout abandonner et de faire ce qu'il faut pour entrer dans CE royaume, pour trouver la paix et la liberté que lui même ne comprend pas. Il préfère s'accrocher aux choses matérielles qu'a celles de dieu.

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    1. Ton interprétation de cette parabole est assez proche de la mienne.
      Je dis juste que le plus grand sacrifice n'est pas de se détacher des biens matériels mais plutôt de notre tendance à vouloir juger le monde et mettre des étiquettes bien/mal sur tout et n'importe quoi (la pomme d'Adam que l'humanité n'a pas encore réussi à digérer).

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